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« Restez avec nous, Seigneur ! »

 

Le soir de Pâques, s’en retournaient chez eux, lassés, harassés de peine et de fatigue, les deux compagnons, disciples du divin Maître. « Ils s’entretenaient de ce qui venait de se passer » (Lc 24, 14).

 

Comme beaucoup de fidèles après un mois sans messe, sans sacrements, ils étaient découragés, désespérés.

Dans sa simplicité, le texte évangélique est sublime. Lisons-le posément :

 

Lc 24,13-35. « Et voici que ce même jour, deux d’entre eux allaient dans un bourg, nommé Emmaüs, éloigné de Jérusalem de soixante stades. Et ils s’entretenaient de toutes ces choses qui s’étaient passées.

Or il arriva, pendant qu’ils parlaient et conféraient ensemble, que Jésus lui-même s’approcha, et marchait avec eux. Mais une force empêchait leurs yeux de le reconnaître.

Et Il leur dit : Quelles sont ces paroles que vous échangez en marchant, et pourquoi êtes-vous tristes ?

Prenant la parole, l’un d’eux, nommé Cléophas, lui dit : Etes-vous seul étranger dans Jérusalem, et ne savez-vous pas ce qui s’y est passé ces jours-ci ?

Quoi ? leur dit-il.  Et ils répondirent : Touchant Jésus de Nazareth, qui a été un prophète puissant en œuvres et en paroles, devant Dieu et devant tout le peuple ; et comment les princes des prêtres et nos chefs l’ont livré pour être condamné à mort, et l’ont crucifié. Or nous espérions que c’était lui qui rachèterait Israël ; et maintenant, après tout cela, c’est aujourd’hui le troisième jour que ces choses se sont passées. Il est vrai que quelques femmes, qui sont des nôtres, nous ont effrayés.  Etant allées avant le jour au sépulcre, et n’ayant pas trouvé son corps, elles sont venues dire que des Anges leur ont apparu et ont affirmé qu’il est vivant. Quelques-uns des nôtres sont aussi allés au sépulcre, et ont trouvé les choses comme les femmes avaient dit ; mais lui, ils ne l’ont pas trouvé.

Alors il leur dit : O insensés, ô cœurs lents à croire tout ce qu’ont annoncé les prophètes ! Ne fallait-il pas que le Christ souffrît ces choses, et qu’il entrât ainsi dans sa gloire ? Et commençant par Moïse et par tous les prophètes, il leur expliquait, dans toutes les Ecritures, ce qui le concernait. Lorsqu’ils furent près du bourg où ils allaient, il feignit d’aller plus loin. Mais ils le pressèrent, en disant : Demeurez avec nous, car le soir arrive, et le jour est déjà sur son déclin.  Et il entra avec eux. Et il arriva, pendant qu’il était à table avec eux, qu’il prit du pain, et le bénit, et le rompit, et il le leur présenta.

Alors leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent ; et il disparut à leurs regards.

Et ils se dirent l’un à l’autre : Est-ce que notre cœur n’était pas brûlant en nous, lorsqu’il nous parlait sur le chemin, et qu’il nous expliquait les Ecritures ? Et se levant à l’heure même, ils retournèrent à Jérusalem ; et ils trouvèrent les onze, et ceux qui étaient avec eux, assemblés, et disant : Le Seigneur est vraiment ressuscité, et il est apparu à Simon. Et ils racontaient eux-mêmes ce qui s’était passé en chemin, et comment ils l’avaient reconnu lorsqu’il rompait le pain. »

 

Ne pouvant tout commenter, nous nous arrêterons sur quelques mots de ce texte, belle histoire si vivante et palpitante. Elle n’a pu être inventée, nous voyons les acteurs : les disciples traînant les pieds, le cœur si las, et cet étranger qui d’un pas allègre, va les dépasser. Mais il s’invite à leur marche et leur discussion, s’intéresse à leur peine si visible, les interroge, apparemment ignorant les événements récents qui les ont bouleversés : « Jésus de Nazareth, qui a été un prophète puissant en œuvres et en paroles, devant Dieu et devant tout le peuple ; et comment les princes des prêtres et nos chefs l’ont livré pour être condamné à mort, et l’ont crucifié. »

 

Résumons en quelques coups de pinceaux, ou quelques notes :

Ils avaient mis toute leur confiance en Lui : il renverserait l’injuste oppresseur, le Romain ! Espoir vain. Il a été crucifié. Voici trois jours que cela est arrivé. Quelques femmes (mais peut-on les croire ? Elles divaguent…) disent l’avoir vu ressuscité. Fadaise que tout cela. Aussi nous rentrons à la maison, pour nous confiner, à l’abri des ragots. Voilà notre histoire, Monsieur.

 

Alors l’étranger prend la parole et en peu de temps brosse un tableau, résumant l’Ancien Testament : « Et commençant par Moïse et par tous les prophètes, il leur expliquait, dans toutes les Ecritures, ce qui le concernait. » Comme nous aurions aimé être présents à cette scène, à ce cours d’Ecriture sainte !

 

Le cours magistral terminé, l’étranger fait mine de partir. Et c’est là, à cette patte d’oie, que tout se passe, en un instant.

 

« Demeurez avec nous ! »

 

L’étranger qu’ils ne reconnaissent pas - car ils le connaissent bien - a éclairé leurs intelligences et c’est tout. Tout aurait pu en rester là. Ils auraient raconté, plus tard, qu’un homme bizarre les avait rejoints, les aurait secoués par ces mots un peu illuminés : « O insensés, ô cœurs lents à croire tout ce qu’ont annoncé les prophètes ! Ne fallait-il pas que le Christ souffrît ces choses, et qu’il entrât ainsi dans sa gloire ? »

 

Celui qui leur a parlé les a vraiment bouleversés ; ils l’invitent, voulant en savoir plus. Et alors, en un instant, tout va être lumineux :

« Et il arriva, pendant qu’il était à table avec eux, qu’il prit du pain, et le bénit, et le rompit, et il le leur présenta.

Alors leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent ; et il disparut à leurs regards.

Et ils se dirent l’un à l’autre : Est-ce que notre cœur n’était pas brûlant en nous, lorsqu’il nous parlait sur le chemin, et qu’il nous expliquait les Ecritures ? »

 

« Ils le reconnurent. »

 

Prions ces disciples, Cléophas et son compagnon de route. Parce qu’ils ont invité Jésus, ils ont retrouvé la Foi perdue, l’Espérance anémiée, la Charité maintenant brûlante, animée par la Présence du Christ ressuscité après sa douloureuse mort, pour l’expiation de nos nombreux péchés.

 

Retenons la leçon : éclairés dans notre intelligence, il faut passer à l’étape suivante, celle de la volonté. Des miracles alors se produisent ! Et si ce miracle intérieur se produisait pour chacun d'entre nous, alors que nous n'en pouvons plus, à force de nous être trop regardés, d'avoir trop considéré nos misères, sans les voir à la lumière du divin Maître ? Il est temps, il est grand temps d'ouvrir les yeux, de changer de vie en prenant vraiment les choses au sérieux. Jésus est intervenu pour ces disciples, il veut aussi être pour nous le divin Chirurgien, avec son scalpel qui décape en douceur tout autant qu'en profondeur. Laissons-Le agir en nous : pour ce faire, invitons-Le comme les Disciples d'Emmaüs. Alors nous serons transformés !

 

Achevons ces quelques considérations par la prière de Padre Pio.

 

Restez avec moi, Seigneur, car j’ai besoin de vous savoir présent pour ne pas vous oublier. Vous savez avec quelle facilité je vous abandonne.

Restez avec moi, Seigneur parce que je suis faible et j’ai besoin de votre force pour ne pas tomber si souvent.

Restez avec moi, Seigneur parce que vous êtes toute ma vie, et, sans vous, je suis sans ferveur.

Restez avec moi, Seigneur parce que vous êtes ma lumière, et, sans vous, je suis dans les ténèbres.

Restez avec moi, Seigneur pour connaître votre volonté.

Restez avec moi, Seigneur pour que j’entende votre voix et que je vous suive.

Restez avec moi, Seigneur parce que je désire vous aimer davantage et être toujours en votre compagnie.

Restez avec moi, Seigneur parce que, si pauvre que soit mon âme, elle désire être pour vous un lieu de consolation, un nid d’amour.

Restez avec moi, Seigneur Jésus, parce qu’il se fait tard et que le jour décline... la vie passe, la mort, le jugement,

l’éternité approchent. Je crains les ténèbres, les tentations, les sécheresses, les croix, les peines. Oh ! combien j’ai besoin de vous, mon Jésus, dans cette nuit de l’exil. Que la communion eucharistique soit la lumière qui dissipe les ténèbres, la force qui me soutienne et l’unique joie de mon cœur.

Restez avec moi, Seigneur parce qu’à l’heure de la mort, je veux rester uni à vous, sinon par la communion, du moins par la grâce et l’amour.

Restez avec moi, Seigneur je ne vous demande pas de consolations divines parce que je ne les mérite pas, mais le don de votre présence, oh ! oui, je vous le demande.

Restez avec moi, Seigneur c’est vous seul que je cherche : votre Amour, votre Grâce, votre Volonté, votre Cœur, votre Esprit. Je vous aime et ne demande pas d’autre récompense que de vous aimer davantage d’un amour ferme et vrai. Je veux vous aimer de tout mon cœur sur la terre, pour continuer à vous aimer parfaitement durant toute l’éternité.

Ainsi-soit-il.

Abbé Dominique Rousseau

Lundi de Pâques 2020

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