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LETTRE DE MGR LEFEBVRE À L’OCCASION DU CARÊME

 

 

       Mgr Lefebvre, dont nous commémorerons le vingt-neuvième anniversaire du décès le 25 mars prochain, a écrit        cette lettre de carême quelques mois après la réunion blasphématoire d’Assise.

       On se souvient que lors de cette rencontre œcuménique ouverte à toutes les fausses religions, Jean-Paul II avait        invité les adorateurs du démon (« Tous les dieux des païens sont des démons » - Ps. 95,5) à adresser leurs                  prières à Allah, Bouddha, etc., et cela publiquement dans les églises d’Assise mises à leur disposition. La                  deuxième partie de ce message rappelle opportunément aux fidèles comment garder l’esprit de foi dans                    l’apostasie générale.

       Le texte est magnifique et mérite d’être relu et médité d’ici Pâques.

       Depuis ce temps, la situation à Rome n’a fait que s’aggraver. Les réunions œcuméniques n’ont cessé de voir le        jour depuis Jean-Paul II, Benoît XVI et François. Aucun de ces trois papes n’a enrayé le processus de mort des        âmes. Bien au contraire… ! Le synode récent sur l’Amazonie en est encore la preuve, avec les divinités                    païennes mises à l’honneur dans les sanctuaires de Rome.

 

       La lettre du Fondateur de la Fraternité Saint-Pie X est donc toujours d’actualité !

 

       Comme catholiques romains, sachons durant ce carême, par nos prières et nos sacrifices, supplier le ciel pour            hâter la fin de la passion de l’Église.

 

       « Et si ces jours n’avaient pas été abrégés, nul homme ne serait sauvé ; mais ces jours seront abrégés en                   faveur des élus » (Mt, 24,22).

 

 

« C’était autrefois une excellente coutume que l’évêque du diocèse adressât une lettre à ses fidèles diocésains à l’approche du Carême.

En effet, comme le dit l’épître du 1er dimanche de Carême :"Frères, nous vous exhortons à ne pas recevoir en vain la grâce de Dieu. C’est maintenant le temps favorable, c’est maintenant le jour du salut." (2 Cor. 6,1-10).

 

Bien chers fidèles, lisez et relisez les notes qui, dans vos anciens missels, vous présentent le temps du Carême. Elles vous rappelleront l’origine et la signification de ces quarante jours de prière et de jeûne, qui nous préparent à la Semaine Sainte, au grand mystère de la Croix pour arriver à la Résurrection.

L’Église veut nous entraîner à la pratique d’une vie chrétienne plus parfaite. Elle nous montre l’exemple du Christ et par le jeûne et la pénitence nous associe à ses souffrances pour nous donner part à sa rédemption.

Tout au long de cette "sainte quarantaine" elle nous rappelle que nous sommes des pécheurs, assaillis par la concupiscence de la chair, la concupiscence des yeux et l’orgueil de cette vie, elle met sur nos lèvres des supplications émouvantes : « Seigneur ne nous traitez pas selon nos péchés ; ne nous châtiez pas selon nos fautes : hâtez-vous, prévenez-nous selon vos miséricordes » (Trait, Mercredi des Cendres).

 

Bienheureux êtes-vous, chers fidèles, qui avez gardé l’esprit de foi et qui vous disposez à cette période de prière et de pénitence avec dévotion, persuadés que vous vous sanctifierez par l’assistance plus assidue à la sainte messe, par la communion fréquente, par le sacrement de pénitence, par le jeûne et l’abstinence, par l’aumône, par une plus grande pratique des vertus chrétiennes : l’humilité, la douceur, la patience, la bonté, la mansuétude ; et, si possible par une sainte retraite, qui vous éloignera du péché, de l’attachement à ce monde pour trouver l’intimité de l’amour de Jésus et Marie et ainsi transformer votre vie.

 

Mais pour croire à cette reviviscence de la grâce dans les âmes, il faut avoir non seulement la foi, mais l’esprit de foi, c’est-à-dire une fois vive animée de l’Esprit-Saint, qui entraîne nos âmes dans la voie de la perfection, dans une charité toujours plus grande envers Dieu et envers le prochain.

 

*

 

Or nous constatons que l’esprit de foi qui croît et vit de la grâce du baptême a disparu dans les milieux les plus élevés de la hiérarchie, les principes qui orientent et dirigent l’esprit du pape et des évêques ne sont plus les principes  de la foi, mais  les  principes de la raison désordonnée, comme ceux qui sont à l’origine du libéralisme protestant, du modernisme, de l’américanisme et du sillonisme, autant de principes qui ont été condamnés par le concile de Trente et tous les papes jusqu’à Pie XII inclusivement.

 

Les derniers papes ont rejeté l’héritage de vingt siècles de l’Église pour se faire les héritiers des libéraux et des modernistes.  Tout ce qu’ils disent ou ce qu’ils font n’est que l’écho de ce qui a été dit et fait par ceux qui depuis quatre siècles sont imbus de ces faux principes. Assise est le fruit le plus parfait du catholicisme libéral condamné par tous les papes qui ont précédé Vatican II.

Nous nous trouvons donc affrontés à un monde ecclésiastique en pleine incohérence, en plein illogisme, cherchant des compromis entre la Vérité et l’erreur, le bien et le mal, la Lumière et les ténèbres, Dieu et Bélial.

 

Cet ébranlement de la foi semble bien préparer l’Antéchrist, selon les prédictions de saint Paul aux Thessaloniciens et selon les commentaires des Pères de l’Église.

 

Lorsque Notre Seigneur décrit la fin des temps, et à sa suite les Apôtres dans leurs lettres, ils s’adressent à ceux qui demeureront fidèles en leur disant : Vigilate, vigilate : Veillez et soyez prêts. « Ainsi donc, frères, dit saint Paul, demeurez fermes et gardez les enseignements que vous avez reçus... »

 

« Cependant le jour du Seigneur viendra comme un voleur, dit saint Pierre, dans sa deuxième épître, en ces jours les cieux passeront avec fracas... la terre sera consumée... Dans cette attente, bien-aimés, faites tous vos efforts, afin d’être trouvés par Lui sans tache et irréprochables dans la paix. »

 

Que nos prières et nos jeûnes soient donc pour nous une source de sanctification, et une supplication pour le retour des pasteurs à la Vérité du Magistère traditionnel de l’Église pour l’honneur de Notre Seigneur, pour son Règne universel et pour le règne de Marie, sa Sainte Mère. »

 

 

Ecône, le 25 janvier 1987, + Marcel LEFEBVRE

Premier dimanche de carême

Sermon de Mgr Lefebvre - Premier dimanche de Carême - 17 février 1991

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C’est à la chapelle de la Visitation à Nice que Monseigneur Lefebvre a célébré le 17 février 1991, premier dimanche de Carême, sa dernière messe solennelle et prononcé sa dernière homélie.

Il remettait au Bon Dieu qu’il avait tant aimé et servi durant sa vie de religieux, de prêtre, de missionnaire et d’évêque, sa belle âme, le 25 mars de la même année, en la fête de Notre-Dame de l’Annonciation, remise cette année-là après Pâques en raison de la Semaine sainte. Il mourut en effet le lundi saint, à l’aube de la Grande Semaine.

 

Mes bien chers frères,

C’est avec une grande joie, une grande satisfaction que je me trouve aujourd’hui au milieu de vous dans cette admirable église de Sainte-Claire, remplie de tant de souvenirs. Il se trouve que la Providence a choisi le premier dimanche de Carême pour que je sois parmi vous. Alors vous me permettrez de vous donner quelques conseils pour bien pratiquer ce carême qui n’est autre que la préparation de la belle fête de Pâques. Nous faire participer à la Résurrection de Notre Seigneur Jésus-Christ, mais avant il faut que nous participions aussi à sa Passion, à sa Rédemption, à son Sacrifice.

Il est vrai que le Carême est un temps de pénitence et que par conséquent nous devons fournir quelques efforts pour nous priver des satisfactions habituelles, du manger, du boire et autres, dont il est bon de se priver de temps en temps pour nous attacher davantage aux biens spirituels, oubliant un peu les biens temporels pour nous élever vers les biens éternels. Mais plus encore que ces pénitences, il plaît à Dieu que nous pratiquions ses commandements. Dieu nous a créés pour Le rejoindre un jour. Ce chemin qui nous conduit à Lui à travers les quelques années que nous passons ici-bas est orienté vers Lui par sa Loi. Sa loi n’est autre en définitive que les jalons que Notre Seigneur a posés le long de notre chemin terrestre pour arriver au Ciel, pour arriver au bonheur céleste.

Que sont donc ces commandements de Dieu ? Notre Seigneur a pris soin Lui-même de nous les rappeler et saint Paul aussi nous le répète. Ils consistent simplement à aimer Dieu et à aimer son prochain. Tous les commandements de Dieu se résument à cela. Et dans la mesure où nous aimons Dieu et où nous aimons notre prochain et que nous le manifestons dans notre vie quotidienne, dans nos actions de tous les jours, nous nous dirigeons paisiblement vers le bonheur du Ciel.

Comment manifester d’une manière particulière notre amour envers le Bon Dieu ? Je pense que la manière la plus profonde, la plus essentielle de manifester notre amour au Bon Dieu c’est de prier. Nous avons tous appris comment prier dans notre catéchisme, le petit catéchisme d’autrefois, car malheureusement les catéchismes d’aujourd’hui ont tout déformé et ne définissent plus rien. Mais nous, nous gardons la bonne définition du temps d’autrefois : « La prière est une élévation de l’âme vers Dieu ».

C’est simple, c’est peu de chose, mais c’est beaucoup. Élever nos âmes vers Dieu. Je pense que si nous pratiquions davantage cette définition de la prière, « élever nos âmes vers le Bon Dieu », nous serions moins attachés justement aux biens de cette terre et nous serions davantage attachés à Dieu Lui-même et aux biens célestes.

Par conséquent, faisons un effort au cours de ce carême, pour mieux prier et pour prier davantage.

Et quelles sont les manières de prier ? Quelles sont les différentes espèces de prières ?

Eh bien, il y a la prière vocale : celle que vous faites ici, au cours de cette Sainte Messe, au cours des exercices que vous faites en commun : le chapelet que vous récitiez tout à l’heure. Ce sont les prières vocales par lesquelles vous exprimez votre amour au Bon Dieu et par lesquelles vous élevez votre âme vers le Bon Dieu. C’est donc une prière que nous devons beaucoup estimer et pratiquer : particulièrement l’assistance à la messe et aussi lorsque nous le pouvons, réciter notre Rosaire, prier la Très Sainte Vierge Marie, nous unir à Elle, et toutes les pratiques de prière vocale, toutes les dévotions approuvées par l’Église et qui sont celles que toutes les âmes dévotes ont faites au cours de leur vie, ces âmes qui, nous ayant précédés au Ciel, chantent maintenant les louanges du Bon Dieu au Ciel, particulièrement les Saints et les Saintes.

L’autre moyen de prier, c’est la prière mentale, ce que l’on appelle l’oraison. L’oraison mentale consiste à élever son esprit vers le Bon Dieu en réfléchissant aux grandeurs de Dieu, à ses perfections, mais sans prononcer de paroles extérieures. C’est une autre forme de la prière. Et celui qui vient au cours de la journée se recueillir auprès du Saint Sacrement, auprès de Notre Seigneur, et qui, sans avoir besoin de prononcer des paroles, élève son âme vers le Bon Dieu, soumis à Lui, pense à Lui, vit quelque temps avec Lui, se séparant ainsi des soucis de ce monde, des soucis quotidiens, pour élever son âme vers le Bon Dieu, effectue la prière mentale. Elle est conseillée bien sûr par les directeurs spirituels, par tous les saints, par tous ceux qui ont fondé des Ordres. Vous savez bien que les bonnes Clarisses qui étaient ici avant, derrière ces grilles, pratiquaient l’oraison mentale pendant de longs moments. Il en est ainsi dans tous les carmels, dans toutes les congrégations religieuses et même les règlements du clergé demandent aux prêtres, aux religieux et religieuses, de pratiquer l’oraison mentale. Alors il est bon pour les fidèles aussi d’imiter ceux qui sont particulièrement consacrés au Bon Dieu et de pratiquer cette oraison mentale. On peut la faire non seulement dans une église, dans une chapelle, on peut la faire chez soi, devant une statue de la Vierge, devant un Crucifix, une petite chapelle que l’on a pratiquée dans sa maison. On peut très bien prier Notre Seigneur et s’unir à la Très Sainte Vierge Marie, dans son esprit.

Il y a une troisième espèce de prière, qui est l’essentiel, qui est la plus importante : prière vocale,

oraison mentale - la prière du cœur.

Qu’est-ce que la prière du cœur ? C’est celle qui exprime intérieurement l’amour que l’on a pour le Bon Dieu, sans même avoir de pensées particulières sur tel sujet, telle perfection du Bon Dieu, telle manifestation de la charité de Dieu envers nous. Mais tout simplement aimer Dieu, exprimer notre amour au Bon Dieu. Elle ressemble un peu à un enfant dans les bras de sa mère, à ce qu’il peut avoir dans son cœur pour sa maman et pour son papa. Il est heureux. Il est dans les bras de son père, de sa mère. Il ne pense pas à autre chose. Il ne pense qu’à aimer ses parents. Eh bien, nous aussi, nous devrions avoir cet amour naturel, profond, constant pour le Bon Dieu. Et cette prière est la plus agréable au Bon Dieu, parce qu’elle nous met à sa disposition. Nous nous offrons par le fait même, tout entiers à Dieu. Nous offrons notre corps, nous offrons notre volonté, nous offrons notre temps et tout ce que nous sommes, à Celui qui nous a créés, à Celui qui nous attend, pour nous donner ce bonheur céleste qu’Il a préparé pour nous. Et c’est le meilleur moyen de ne plus pécher, du moins de ne plus pécher gravement. Celui qui aime vraiment le Bon Dieu, en quelque sorte donne son être et tout ce qu’il est au cours de la journée et tout le temps. Cette prière du cœur peut exister toujours, sans arrêt. De même qu’un enfant qui aime ses parents, les aime toujours, avec une continuité parfaite, nous aussi nous devrions aimer de cette manière le Bon Dieu. Et l’aimant de cette manière, le péché ne nous fera plus peur, parce que nous sentirons qu’une désobéissance au Bon Dieu nous éloigne de Lui. Alors, si vraiment nous L’aimons, comment vouloir à la fois L’aimer de tout notre cœur et en même temps Lui déplaire et Lui désobéir. Il y a comme une espèce de contradiction. Voilà pourquoi la prière du cœur est si importante.

Je vous demande beaucoup au cours de ce carême de vous mettre entre les mains du Bon Dieu, d’oublier un peu les choses de ce monde, pour vous attacher au Bon Dieu. C’est le premier conseil que je vous donnerai au sujet de cette réalisation de la Loi du Bon Dieu qui nous demande de L’aimer. La première table de la Loi de Moïse portait ces trois commandements pour le Bon Dieu. La deuxième table, c’était celle qui indiquait la loi de l’amour du prochain. Comment pourrions-nous manifester notre amour envers le prochain ? Certes par les services que nous rendons à notre prochain dans nos familles, dans notre profession, dans notre vie quotidienne, mais nous pourrions aussi nous demander comment nous manquons de la manière la plus fréquente à l’amour envers notre prochain.

Il faut pour cela consulter saint Jacques qui, dans la lettre qu’il a écrite et qui est consignée dans la Sainte Écriture, nous parle de ce petit membre que le Bon Dieu nous a donné et qui s’appelle la langue. Et il nous dit : « C’est avec la langue que l’on chante les louanges du Bon Dieu, mais c’est aussi avec la langue que l’on allume le feu de l’iniquité et le feu de la division ». Et c’est vrai.

Alors faisons un petit effort pour pratiquer la charité de la parole et, par le fait même, la charité de la pensée.

Ainsi, évitons les jugements téméraires, les médisances, les calomnies qui sont si faciles et si tentantes parfois dans les conversations. On aime malheureusement critiquer ceci, cela ; diviser au lieu d’unir, au lieu de pratiquer la charité. Faisons un effort pour manifester l’amour de notre prochain au cours de ce carême en essayant d’éviter médisances et calomnies, tous ces péchés de la langue. Voilà, mes bien chers frères, les conseils qu’il me semble bon de donner au début de ce carême.

Demandons à la Très Sainte Vierge Marie, à saint Joseph, à l’Enfant Jésus de vivre comme ils ont vécu à Nazareth. Il faut penser que l’exemple que Notre Seigneur nous a donné est absolument remarquable. Dieu Lui-même (car c’est Dieu qui est descendu parmi nous) qu’a-t-il fait pendant les trente-trois années de sa vie ? Sur ces trente-trois années qu’Il a passé ici-bas avant de monter au Ciel, Il est resté trente ans dans la vie de famille, sauf lorsque, quittant ses parents, Il demeura à Jérusalem pour aller enseigner les docteurs de la Loi. C’est le seul événement que nous connaissons au cours de son enfance, de son adolescence. Jusqu’à l’âge de trente ans Il a pratiqué la charité dans la famille. C’est un exemple admirable que Notre Seigneur nous a donné.

Il ne nous demande donc pas des choses absolument impossibles, seulement la pratique de la charité, pratique de la charité envers Dieu, envers le prochain, comme Il l’a fait Lui-même dans la famille de Nazareth.

Demandons à la Vierge Marie et à saint Joseph de nous aider à pratiquer cette charité pour que, avec la grâce du Bon Dieu, avec la grâce des sacrements que nous recevons, nous nous dirigions lentement vers le but pour lequel nous sommes ici-bas : partager un jour le bonheur du Ciel avec tous ceux que nous aimons et qui nous ont quittés.

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.

Contemplation et obéissance

Monseigneur Marcel Lefebvre

 

Deuxième dimanche de carême - 10 mars 1974

 

Contemplation et obéissance à Dieu

 

Mes bien chers amis, mes bien chers frères,

 

Vous venez d’entendre dans l’Évangile, le récit de la Transfiguration de Notre Seigneur et vous avez peut-être remarqué qu’hier, samedi des Quatre temps, nous avons déjà lu le même Évangile.

 

La Tradition nous dit qu’autrefois à la Station de Saint-Pierre à Rome, les chrétiens se réunissaient autour du Souverain Pontife et passaient la nuit en prière, pour préparer les ordinations qui devaient avoir lieu dans la matinée du dimanche. C’est pourquoi on lisait, en ce temps-là, au cours de la nuit de prière, l’Évangile de la Transfiguration qui était répété lorsque les deux cérémonies ont été séparées, celle du dimanche et celle du samedi des Quatre-Temps. C’est pourquoi nous avons cette répétition du même Évangile.

 

Mais nous pouvons nous demander surtout, nous poser cette question, pourquoi l’Évangile de la Transfiguration en ce temps de carême ? Ne devrions-nous pas plutôt méditer sur la Passion de Notre Seigneur, sur ses souffrances, sur ses douleurs, plutôt que sur sa gloire. Précisément la Sainte Église a voulu en cela, suivre l’exemple que Notre Seigneur nous donne. Notre Seigneur a voulu qu’avant sa Passion, avant la nuit du scandale de la Croix, du scandale du Sang, qui a inondé son visage, avant cette nuit de l’agonie, cette nuit du jugement, cette nuit de la flagellation, qu’avant cette nuit où les apôtres se sont dispersés. Notre Seigneur a voulu affermir leur foi, la foi de Pierre, de Jacques et de Jean, en leur montrant sa gloire.

 

C’est pourquoi l’Église a voulu, que ce récit de la Transfiguration figure en ce temps de carême, afin d’affermir notre foi, afin d’affermir notre espérance. Car, si au cours des semaines qui viennent, nous aurons à méditer sur les souffrances et les douleurs de Notre Seigneur, sur sa crucifixion, sur sa mort, eh bien nous aurons cette pensée que c’est le même qui souffre et qui également a reçu cette gloire sur le Thabor. Et par conséquent est vraiment Dieu.

 

Ceci doit être pour nous, en même temps il me semble, une grande leçon, dans notre vie courante, dans notre vie quotidienne.

Si Notre Seigneur a voulu raffermir la foi de ses apôtres en manifestant sa gloire auprès d’eux, c’est que nous avons besoin ici-bas, d’être raffermis, d’être en contact plus intime avec le Ciel, avec la gloire de Dieu. Et il me semble que c’est pour nous une grande leçon, pour notre vie sacerdotale en particulier et même aussi pour la vie des consacrés à Dieu et la vie de tous les chrétiens. Nous avons besoin de vie contemplative, pour mener une vie active vraiment féconde et chrétienne.

 

Nous ne pouvons pas nous passer de contemplation. Car c’est cela en définitive que Notre Seigneur a voulu donner aux apôtres. Il a voulu leur donner quelques instants, une contemplation admirable de sa gloire.

Donc c’est l’image de la vie contemplative que nous devons tous avoir. Nous devons être des contemplatifs. Notre Seigneur l’a voulu ; Notre Seigneur le veut toujours.

Contemplatifs comment ? En ayant les mêmes grâces que les trois apôtres qui ont vu Notre Seigneur dans sa gloire.

Cela c’est le secret de Dieu. Mais ce n’est pas cela en général que Notre Seigneur nous a promis. Notre Seigneur nous promet d’être avec nous, d’être en nous, glorieux, dans sa gloire, dans nos cœurs, dans nos âmes, uni à nous, si nous voulons observer ses commandements.

Et pour être dans les dispositions vraiment parfaites à cette vie contemplative, nous devons aussi demander à Dieu ce qu’il pense. Et Il nous l’a dit. Notre Seigneur nous l’a dit dans ses Béatitudes :

Beati mundo corde : quoniam ipsi Deum videbunt : (Mt 5,1,12) « Bienheureux ceux qui ont le cœur pur, car ils verront Dieu ». C’est à ceux-là que Notre Seigneur promet la vision de Dieu, et la vision de Dieu ici-bas. Dans ses béatitudes. Notre Seigneur ne parle pas du futur. Sans doute Il promet aussi la récompense à ceux qui pratiquent la justice, mais Il promet ici-bas déjà sa vision, sa vision d’une manière particulière : Beati mundo corde : « Bienheureux les cœurs purs ». Qu’est-ce que cela veut dire les cœurs purs ? C’est-à-dire les cœurs détachés d’eux-mêmes, des cœurs qui fuient l’égoïsme et qui fuient l’orgueil. C’est cela qui nous empêche de nous unir à Dieu. Tout ce qui entretient notre égoïsme, tout ce qui entretient notre orgueil diminue la vision que nous pouvons avoir de Dieu, par la grâce sanctifiante, par la présence de Dieu en nous. Car cette présence de Dieu en nous est surtout une présence qui est dans notre intelligence, dans notre volonté et dans notre cœur.

 

Nous pouvons voir Dieu des yeux de la foi. Et les grâces que le Bon Dieu nous donne, suivant qu’elles tombent dans un terrain bien préparé, suivant qu’elles tombent dans des cœurs plus ou moins purs, fructifient plus ou moins. Et c’est pourquoi, nous sommes parfois surpris de voir que des personnes qui fréquentent de la même façon les sacrements ont des grâces toutes différentes. Que certains progressent rapidement dans la sainteté et la perfection et que d’autres piétinent.

Pourquoi ? Le secret de cela c’est surtout le manque d’humilité. Pour acquérir la pureté du cœur, il faut avoir l’humilité ; il faut s’oublier soi-même pour ne plus penser qu’à Dieu, pour ne plus voir que Dieu.

Esurientes implevit bonis : « Ceux qui sont pauvres. Il les remplit de biens ». (...) et divites dimisit inanes : « Ceux qui sont riches. Il les renvoie les mains vides ».

Les mains vides, si nous sommes riches de nous-mêmes, si nous sommes plein de nous-mêmes, le Bon Dieu n’a plus rien à faire en nous. Si au contraire, nous sommes vides de nous-mêmes, alors il y a place pour Dieu en nous.

 

Humilibus dat gratiam, superbis resistit : « Aux humbles Il donne la grâce, aux orgueilleux Il résiste. »

C’est grave que Dieu résiste aux âmes, que Dieu ne veuille plus rentrer dans une âme parce qu’il y trouve l’orgueil. Au contraire aux âmes humbles Il donne la grâce.

Ainsi prenons la résolution, si nous voulons vraiment vivre avec Dieu, voir Dieu d’une manière qui, certes ne sera pas la vision béatifique, mais qui sera un commencement de cette vision béatifique qui nous est promise. La grâce n’est pas autre chose que le commencement de la vision béatifique.

Les âmes qui ont eu de grandes grâces le disent. On peut expérimenter Dieu, expérimenter la présence de Dieu en nous, comme la présence d’un ami dans l’obscurité. Si nous ne le voyons pas, nous connaissons la présence de cet ami, de cette personne aimée auprès de nous. Nous ne la voyons pas, mais nous la connaissons, nous savons qu’elle est là.

 

De même nous pouvons par la grâce, savoir, avoir la foi et croire que Dieu est présent en nous, qu’il est avec nous. Il nous le dit d’une manière très précise : Si diliget me : mandata mea servate (Jn l4, l5) : « Si quelqu’un garde mes commandements, celui-là m’aime ».

Qui autem diligit me, diligetur a Patre meo : « Si quelqu’un m’aime, il sera aimé de mon Père ». Et ego diligam eum et manifestabo ei meipsum (Jn l4,2l) : « Celui qui m’aime sera aimé de mon Père ». Je l’aimerai et je me manifesterai à lui.

 

Donc reprenons le début de la phrase : Si quis servat mandata mea : « Si quelqu’un observe mes commandements, je me manifesterai à lui ». Faire la volonté du Bon Dieu, se soumettre à la volonté du Bon Dieu, être dans l’obéissance, comme Notre Seigneur nous en a Lui-même montré l’exemple. Si nous voulons suivre un jour Notre Seigneur sur le Thabor, suivons-Le aussi dans son humilité, suivons-Le dans sa Croix ; suivons-Le dans son Eucharistie où Il se cache humblement pour nous, comme Il l’a fait sous le voile de son humanité.

Suivons donc Notre Seigneur dans son humilité, si nous voulons Le suivre aussi dans sa gloire. Notre Seigneur a dit : Humiliavit semetipsum factus obediens usque ad mortem, mortem autem crucis (Ph. 2,8) : « Il s’est rabaissé lui-même, se rendant obéissant jusqu’à la mort et jusqu’à la mort de la Croix ».

 

Il s’est humilié jusqu’à se faire obéissant, obéissant jusqu’à la mort sur la Croix, c’est-à-dire jusqu’à son dernier souffle. Si nous aussi nous voulons être à l’image de Notre Seigneur, si nous voulons Le suivre, nous devons aussi nous humilier jusqu’au dernier souffle de notre vie et obéir jusqu’au dernier souffle de notre vie. Et ainsi, nous entrerons un jour, s’il plaît à Dieu, dans la gloire qu’il a manifestée au jour du Thabor.

 

Demandons-le à la très Sainte Vierge Marie. Elle qui n’avait pas besoin de monter sur le Thabor pour croire à la gloire de Notre Seigneur Jésus-Christ. Elle qui a été louée par Notre Seigneur.

Il l’a dit à ceux qui disaient : Ici sont tes frères, tes sœurs, ta mère. Il les a repris en disant : « Ceux qui sont mes sœurs, mes frères et ma mère, ce sont ceux qui font la volonté de mon Père ».

Que voulait dire ainsi Notre Seigneur ? Il ne voulait pas du tout signifier qu’il ne reconnaissait plus sa mère. Il voulait signifier au contraire, que sa mère était beaucoup plus sa mère, parce qu’elle avait fait la volonté du Bon Dieu que parce qu’elle était sa mère qui l’avait enfanté.

C’est par son Fiat que la très Sainte Vierge est plus proche encore de Notre Seigneur que par son enfantement.

 

Voilà la leçon que Notre Seigneur nous donne au sujet de sa mère qui est plus agréable au Bon Dieu parce qu’elle a obéi, que parce qu’elle a été la mère de Jésus.

Nous demanderons à Marie de nous aider à faire toujours la sainte volonté de Dieu, afin qu’un jour nous puissions entrer dans sa gloire.

 

Au nom du Père, du fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.

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